Peter Lindbergh : mort d’un homme qui savait photographier les femmes

Connu pour ses photographies de stars et de mannequins en noir et blanc, le photographe de mode allemand s’est éteint à l’âge de 74 ans. Retour sur la carrière d’un génie de la pellicule.

© Francesco – Adobe Stock

L’humaniste

« Je répète très souvent que nous, les photographes, sommes là pour libérer les femmes de la dictature de la perfection et de la jeunesse. L’industrie fait son boulot, elle a des produits à vendre, mais tout le monde n’est pas obligé de suivre. » affirmait le photographe dans les pages du Monde il y a trois ans.

Né le 23 novembre 1944 à Lissa, ville annexée par l’Allemagne à l’époque, aujourd’hui Leszno en Pologne, Peter Lindbergh s’en est allé ce mardi 3 septembre à l’âge de 74 ans au centre de Paris. A son actif, une véritable identité artistique grâce à des clichés noir et blanc qui ont grandement participé à l’histoire de la mode contemporaine.

Après une enfance passée dans le Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie à Duisbourg, le jeune Peter est parti étudier à l’Académie des beaux-arts de Berlin poussé par son appétit du cinéma allemand de l’entre-deux-guerres et de la sculpture. Plus tard, en tant que photographe, il rejoindra le magazine allemand Stern.

Collaborant avec de très nombreuses revues de mode par la suite (Vogue, Vanity Fair, The New Yorker…) et participant à un grand nombre de publicité, le photographe allemand était considéré comme un pionner de son art.

En noir et blanc

C’était une signature reconnaissable à des kilomètres. Ses clichés au grain et à l’ambiance hyperréalistes ont fait de Lindbergh, le maitre du portrait. Participant grandement à l’éclosion des super-modèles dans les années 1990 comme Naomi Campbell, Claudia Shiffer, Cindy Crawford ou encore Kate Moss qu’il décrivait comme « la fille la plus cool du monde », Peter Lindbergh s’inspirait énormément du photojournalisme et de l’univers des documentaires.

Protestant énergiquement contre l’utilisation de Photoshop, l’allemand s’est démarqué de tous lorsqu’un jour de janvier 1988, sur la plage de Santa Monica en Californie, il photographie six mannequins, ne portant rien d’autre qu’une chemise blanche. Dans une habitude esthétique ultra-léchée et de mises en scènes luxueuses, l’image révolutionne le monde de la photographie et installe Linda Evangelista, Estelle Lefébure, Tatjana Patitz, Karen Alexander, Rachel Williams et Christy Turlington comme les mannequins les plus célèbres de la planète.

Institution

Recordman des collaborations avec le célèbre calendrier Pirelli, Peter Lindbergh aimait beaucoup les actrices, à qui il a souvent fait la part belle. Encore très actif et présent sur les réseaux sociaux, le photographe allemand venait de participer à l’édition britannique de Vogue du mois de septembre. A cette occasion, il avait immortalisé l’actrice mexicaine Salma Hayek, la première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern et la jeune activiste suédoise Greta Thunberg. Un homme qui savait photographier les femmes et qui par ses photos, voulait les défendre contre les stéréotypes de la beauté : « L’image que l’on renvoie aux femmes aujourd’hui est épouvantable. Avec Photoshop, on en fait des robots, comme si c’était un avantage de faire 1,80 m et 45 kg. Pour moi, cette norme signe la fin de la civilisation. »

La fin d’une icône.

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